Genève, Bibliothèque de Genève, Ms l.e. 210
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Isabelle Jeger, dans Antologia della Divina Proporzione di Luca Pacioli, 2010, pp. 31-35 – rédigé et complété par Brigitte Roux, e-codices, 2019.

Titre du manuscrit: Luca Pacioli, De divina proportione
Origine: Milan
Période: 1498
Support: Parchemin très mince, probablement constitué de peaux de moutons ; la règle de Gregory est respectée dans tout le volume, sauf entre les f. 2-11 et 3-10
Volume: 130 folios; gardes antérieures (5 folios) et postérieures (5 folios) en papier chiffon, mises en place en 1992-1996 lors de la confection de la reliure actuelle ; 2 anciennes feuilles de garde en papier sont conservées à part, avec l’ancienne reliure.
Format: 285/288 x 200/203 mm
Numérotation des pages:
  • les 10 premiers folios (table des matières de l’ouvrage) contiennent deux foliotations modernes :
    • une foliotation au crayon en chiffres arabes, de 2 à 11, placée au milieu de la marge droite, côté recto
    • une foliotation au crayon en chiffres arabes, de 1 à 10, placée en haut à gauche, côté recto (cette foliotation a été apposée par A. Giovannini dans les années 1992-1996)
  • les 120 folios suivants (texte du traité et figures géométriques) contiennent :
    • une foliotation originale en chiffres romains, de I à CXX, notés à l’encre au milieu de la marge supérieure, côté recto
    • une foliotation au crayon apposée par A. Giovannini sur les folios suivants : f. I, II, III numérotés par A. Giovannini f. 11, 12, 13 ; f. LXL à CXX numérotés par A. Giovannini f. 90 à 120
  • Dans cette description sont utilisées la foliotation 2-11 pour le 1er cahier et la foliotation romaine pour les cahiers suivants.
Composition des cahiers: 13 cahiers, tous des quinions. Le 1er cahier était à l’origine un sénion, dont il manque les folios 1 et 12 (le premier folio a été perdu en 1916 lors des travaux de désinfection). Réclames verticales notées au dernier folio des cahiers, côté verso, à partir du 2ème cahier (f. Xv) jusqu’au 9ème cahier (f. LXXXv)
Etat: Parchemin endommagé par des colonies de micro-organismes
  • en 1916, désinfection aux vapeurs de formol entreprise par le Professeur R. Chodat
  • années 1992-1996, le parchemin continuant à s’altérer, le manuscrit a été restauré par Andrea Giovannini, conservateur-restaurateur à Bellinzona (Suisse, Tessin)
Mise en page: Réglure à l’encre à peine visible, justification : 174 x 104 mm, longues lignes, 25 lignes par page (f. 3r-11r, table des matières) et 23 lignes par page (f. Ir-LXXXVIIIr, texte du traité)
Type d'écritures et copistes: Ecriture humanistique. Suite à un premier regroupement réalisé par A. de la Mare (1983), le copiste de ce manuscrit a depuis été identifié avec Giovanni Battista Lorenzi. La copie du De divina Proportione de l’Ambrosienne (Ms. & 170 sup.) lui est également attribuée (Barbero 2010; Pontone 2013). Les notes marginales, mettant en évidence des mots du texte, sont dues au mêmes copiste.
Décoration:
  • Une miniature au f. Ir due au « Maestro dell’Epitalamio di Giasone del Maino », actif à Milan à la fin du XVe-début du XVIe siècle (Quattrini 2004) ; la scène représente Luca Pacioli, accompagné d’un frère franciscain, offrant son livre au duc de Milan Ludovic Sforza qui siège en présence de quatre conseillers debout. Cette miniature est surmontée d’un cartouche contenant une dédicace de l’œuvre au duc, inscrite en lettres capitales d’or sur un fond grenat (cf. incipit f. Ir). Le « Maestro dell’Epitalamio di Giasone del Maino » collabore avec le copiste Giovanni Battista Lorenzi à d’autres occasions, par exemple pour le Liber Iesus (Milan, Trivulaziana, 2163, fol. 1v et 8r).
  • 60 figures géométriques dessinées à la plume et coloriées en bistre et en sépia, en pleine page (f. LXLv-CXXr). Ces figures représentent des polyèdres réguliers, montrés en vis-à-vis dans leur forme pleine, « solidi » (verso), et dans leur forme évidée, « vacui » (recto). Chaque polyèdre est accompagné d’une légende en latin placée au-dessus de lui, et d’une légende en grec placée au-dessous, ainsi que d’une numérotation en chiffres romains, inscrite sur la marge latérale extérieure du folio, laquelle renvoie aux numéros notés en rouge dans les marges du traité ; la succession des figures ne suit pas l’ordre numérique. L’une de ces figures a été dessinée par erreur (f. CXv).
    L’attribution de ces dessins à Léonard de Vinci se retrouve déjà dans le catalogue de Sénebier (1779), mais elle n’a cessé d’être sujette à discussion. D’après Frédéric Elsig, professeur d’histoire de l’art à l’Université de Genève : « Le manuscrit contient des illustrations dont l’invention se réfère aux idées de Léonard mais dont l’exécution ne saurait être attribuée à sa main, comme le confirme la confrontation avec les dessins jugés autographes » (communication écrite février 2019).
  • 40 figures géométriques, de petit format, tracées à l’encre – la même encre que le texte – dans les marges latérales extérieures du traité (sauf f. LXXIv et LXXXv).
  • 75 initiales peintes à l’or sur un fond peint, alternativement bleu ou rouge, et orné de rinceaux blancs, inscrit dans un cadre rectangulaire, accompagnées de rubriques.
Reliure: en parchemin blanc de mouton sur plats en carton, confectionnée en 1992-1996 ; quatre nerfs en cuir de chèvre ; tranchefiles ; les nerfs et les âmes des tranchefiles, passant sur la couvrure, sont visibles ; un fermoir en lanières de cuir blanc. L’ancienne reliure en parchemin blanc est conservée à part.
Langue principale: italien
Sommaire:
Le franciscain Luca Pacioli (Borgo San Sepolcro, 1445 – Rome, 1517) est l’auteur de ce traité de mathématiques, en 71 chapitres, écrit en italien en 1498 (9 février 1498 au f. Ir ; 14 décembre 1498 au f. LXXXVIIIr). On connaît trois copies de ce texte, dont deux sont conservées, l’une à la Biblioteca Ambrosiana à Milan (Ms. & 170 sup.), l’autre – le présent manuscrit – à la Bibliothèque de Genève (la 3e perdue était destinée à Pietro Soderini).
  • f. 2r : blanc avec l’inscription d’un ancien possesseur (voir à provenance)
  • f. 2v : blanc
  • f. 3r-11r : Table des matières >[T]avola de la presente opera e utilissimo compendio detto de la divina propor[tione] < A cio piu facilmente quel che in questo …–… Terzetto e distico litterale de li corpi al lectore. carte. LXXXVIIII.
  • f. 11v : blanc
  • f. Ir-LXXXVIIIr : De divina proportione
    • Dédicace en latin : Ex[cellentissi]mo p[rincipi] Ludovico M[ariae] Sf[ortiae] An[…], mediolanen[si] duci inclito, pacis et belli ornamento, fr[atris] Luce ex Burgo S[anc]ti Sepulcri, or[dinis] mi[norum], sacre theo[logiae] profes[soris], de divina proporti[one] epistola.
    incipit: [E]ssendo ex[cellentissim]o D[uca] a di VIIII° de febraro de nostra salute gli anni o 1498 correndo, nel inspugnabil arce de l’inclyta vostra cita de Milano …–… explicit: Que iterum atque iterum felicissime valeat. Finis.
  • f. LXXXVIIIr : Colophon sur 5 lignes: >A di XIIII° dicembre in Milano nel nostro almo convento governando tutta la provintia, el R[everen]do P[adre] de sacra theo[logi]a professore M[aestro] Fran[ces]co Mozanica dignissimo ministro de quella, MCCCCLXXXXVIII, sedente summo pontifice Alex[andr]o VI° del suo pontificato anno VII°. <
  • f. LXXXVIIIv : poème de trois vers italiens, suivi d’un distique de deux vers latins (édités par H. Aubert 1911, p. 184)
  • f. LXXXIXr-LXLr : blanc
  • f. LXLv-CXXr : 60 figures géométriques dessinées en pleine page et numérotées
  • f. CXXv : blanc
Origine du manuscrit: Armoiries (f. Ir) : blason écartelé aux 1 et 4 d’or à l’aigle éployée de sable, aux 2 et 3 d’argent au serpent d’azur ondoyant en pal et dévorant un enfant de gueules ; l’écu est surmonté d’une couronne ducale avec l'« impresa dei piumai » (deux branches, l'une de laurier, l'autre de palmier, symbolisant la paix et la victoire) ; il est encadré de l'« impresa dei tisoni ardenti » (tisons ardents auxquels sont attachés des petits seaux d'eau) ; ce sont les armoiries de Ludovico Mario Sforza dit « il Moro » (1452-1508).
Emblème du duc Ludovic le More, « L’ascia col tronco d’albero » (f. LXIIv) : un bras droit vêtu d’azur, sortant d’une nuée d’azur, tenant une hache qui équarrit une pièce de bois, avec des copeaux répandus dessous ; sur la banderole enroulée autour du bras se lit : El va in tuto. Il s'agit de la devise tronquée par l'enroulement de la banderole : « Tuto el tort el va in tache » ou « Tuto el zoco el va in tape ». Une légende explicative, « mottivo ducale. », est inscrite au-dessous de l'emblème par le copiste du texte.
Provenance du manuscrit:
  • f. 2r : en haut : une ancienne cote « I. 7 » ; au-dessous : une inscription d’une écriture du XVIe siècle : Palmensis (?), et au-dessous : Ja Palma ou La Palma. Au verso de la feuille de garde antérieure de l’ancienne reliure, dans une écriture non identifiée du XVIIIe siècle, peut-être du XVIIe siècle, on lit : « Le nom Ja Palma y inscrit pourrait être le fameux peintre Jacopo Palma – Vecchio ou Giovane, le père ou le fils ».
  • Collection Petau, n° 119
  • Ami Lullin (1720)
Acquisition du manuscrit: Bibliothèque de Genève (legs Ami Lullin, 1756)
Fac-similé:
  • Luca Pacioli, De Divina Proportione, Sansepolcro, 2010, 2 vols. (vol. 1 : fac-similé du manuscrit de Genève L.e.210 ; vol. 2 : Antologia della Divina Proporzione)
Bibliographie:
  • Jean Senebier, Catalogue raisonné des manuscrits, Genève, 1779, p. 464.
  • Hippolyte Aubert, Notices sur les manuscrits Petau conservés à la Bibliothèque de Genève (Fonds Ami Lullin), Paris 1911, p. 181-184.
  • Bernard Gagnebin, L’enluminure de Charlemagne à François Ier, Genève, 1976, n° 83.
  • P. Speziali, « Les dessins de la Divina proportione de Pacioli », Stultifera Navis, 1954, pp. 9-12.
  • A. C. de la Mare, « Script and Manuscripts in Milan under the Sforzas », in Milano nell’età di Ludovico il Moro, Milan, 1983, vol. 2, pp. 399-408.
  • J.J.G. Alexander, « The Livy (MS 1) illuminated for Gian Giacomo Trivulzio by the Milanese artist « B.F. » », The Yale University Library Gazette, 1991, pp. 219-231.
  • Marisa Dalai Emiliani, « Figure rinascimentali dei poliedri platonici : qualche problema di storia e di autografia », in Fra Rinascimento, manierismo e realtà, scritti di storia dell’arte di Anna Maria Brizio, Florence, 1984, pp. 7-15.
  • Cristina Quattrini, « Maestro dell’Epitalamio di Giasone del Maino », in Dizionario biografico dei miniatori italiani. Secoli IX-XVI, sous la direction de Milvia Bollati, Milan, 2004, p. 578.
  • Noémie Etienne, « Luca Pacioli », in La Renaissance italienne. Peintres et poètes dans les collections genevoises, dir. M. Jeanneret et M. Natale, Genève, 2006, p. 210-215.
  • Pier Luigi Mulas, « Codici miniati di Gian Giacomo Trivulzio », Viglevanum, XVII, 2007, pp. 8-27.
  • Giliola Barbero, « Nuovi manoscritti di Giovanni Battista Lorenzi copista e segretario milanese », Aevum, vol. 84, fasc. 3, 2010, pp. 695-709 (p. 695).
  • Marzia Pontone, « I manoscritti trivulziani per Massimiliano Sforza e l’attività milanese del copista Giovanni Battista Lorenzi », Aevum, 87, 2013, pp. 685-711 (p. 686 et 695).
  • Pietro Marani, « Leonardo’s Cartonetti for Luca Pacioli’s Platonic Bodies », in C. Moffat et S. Taglialagamba (éd.), Illuminating Leonardo. A Festschrift for Carlo Pedretti Celebrating His 70 Years of Scholarship, Leiden-Boston, 2016, pp. 69- 84.